Nouvelles mobilités
Bornes de recharge : l’UE met les watts
En 2020, une voiture sur dix vendue dans l'Union européenne était un véhicule électrifié rechargeable. En 2030, le nombre de voitures électriques en circulation devrait avoir été multiplié par 50 pour atteindre 30 millions. Un parc que 3 millions de bornes devront permettre de recharger dans l’espace public. Les investissements nécessaires à cette transformation se chiffrent en milliards d’euros.
Dans un rapport publié le 13 avril 2021, la Cour des comptes européenne a alerté l’UE sur les trois points principaux :
- L’UE s’est fixé un objectif intermédiaire ambitieux d’un million de bornes de recharge en 2025. Pour y parvenir, et en partant de 250 000 bornes (dont 15% aptes à la recharge rapide) en 2020, 150 000 nouveaux points de recharge doivent être installés chaque année, soit 3 000 par semaine.
- L'Allemagne, la France et les Pays-Bas concentrent la grande majorité (69 %) des points de recharge. « La Commission devrait soutenir davantage le développement du maillage au niveau européen et devrait s'assurer que le financement de l'UE parvienne là où le besoin est le plus impérieux », ajoute Ladislav Balko, responsable du rapport.
- La multiplicité des systèmes de paiement et d’information complique l’expérience des utilisateurs.
Le point de vue des constructeurs
L’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) publie un constat similaire par l’intermédiaire de son directeur, Oliver Zipse, par ailleurs président du BMW Group :
« Les énormes investissements réalisés par l'industrie automobile pour accélérer le déploiement des gammes à propulsion alternative ne peuvent être soutenus que si les gouvernements commencent à faire des investissements correspondants dans les infrastructures. C'est pourquoi tout nouvel objectif de déploiement des véhicules électriques à l'horizon 2030 doit être conditionné à une montée en puissance des infrastructures correspondantes. »
Autrement dit, si le déploiement des infrastructures de recharge devait prendre du retard sur l’offre de véhicules électriques, la demande risquerait de ne pas suivre.
Quelles solutions ?
La Cour des comptes européenne émet les recommandations suivantes à destination de l’UE :
- Établir une feuille de route stratégique pour atteindre les objectifs en matière d’infrastructures de recharge.
- Proposer des normes et des exigences minimales sur les axes du réseau transeuropéen de transport routier (RTE-T).
- Répertorier les besoins d’infrastructures, tronçon par tronçon, et en coordination avec les gestionnaires des réseaux.
- Allouer le financement de ce réseau de recharge sur la base de critères objectifs et d’analyses du déficit.
- Garantir un accès durable et équitable aux infrastructures cofinancées.
En complément des efforts de l’UE, d’autres avancées déjà en cours ou possibles devraient permettre de répondre aux besoins :
- Concernant les entreprises, et selon une étude d’Eurelectric, les véhicules utilisés par les entreprises (VP et utilitaires) parcourent 2,25 fois plus de kilomètres que les véhicules des particuliers. Ils accumulent 40% des distances totales parcourues en Europe. Dans ce contexte, encourager les professionnels à installer des points de recharge sur leurs sites s’impose, pour des raisons pratiques mais aussi financières : sur les 80 milliards d’euros nécessaires à l’électrification des infrastructures, les ¾ seront financés par le secteur privé. Un montant supplémentaire de 25 milliards d'euros sera par ailleurs nécessaire pour permettre aux réseaux de distribution d'électricité de soutenir le déploiement de l'infrastructure de charge.
- Faciliter aussi l'installation de bornes de recharge chez les particuliers reste incontournable.
- Les acteurs traditionnels de la distribution de carburant s’adaptent pour proposer une offre multi-énergies et des moyens de paiement simplifiés.
- L’autonomie croissante des véhicules électriques, alliée à l’adoption de technologies de charge rapide, vont contribuer à faire baisser l’encombrement des bornes.
La décarbonation du transport routier est en marche. L’automobile n’aura jamais pris un virage aussi important et les constructeurs se sont adaptés à une vitesse inimaginable il y a encore cinq ans. Les infrastructures de recharge suivent en léger différé. Le plus difficile est peut-être ailleurs : garantir au réseau une électricité verte.